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La pulsion : l'alibi du patriarcat

27 Juillet 2018, 19:28pm

Publié par de soupirs en sourires

Les arguments fallacieux sur les pulsions sexuelles irrépressibles, ou d’un jeu sadomaso qui rendent la victime complice d'un agresseur, reviennent souvent dans les prétoires lorsque qu'exceptionnellement la justice applique les textes. Il est important de retenir qu'il y a une véritable volonté pour les magistrats de ne pas sanctionner ces actes horribles et c'est un aveu de déchéance révoltant pour notre pays. 

 

Dans la majorité des cas, les hommes auteurs de viols ne présentent pas de troubles mentaux particuliers même si les clichés persistent encore et font la part belle aux rares décisions rendues, bien trop souvent injustes.

 

Les femmes n’ont jamais été protégées et depuis le début de l’Humanité, leurs corps ont toujours été soumis à la volonté des hommes. Il a fallu attendre 25 siècles pour que l’on se décide à leur donner le droit de pouvoir en disposer. Mais pourtant, elles ne sont toujours pas écoutées, aidées et comprises. On persiste et signe à trouver des excuses aux violeurs alors que l’agression commise par un inconnu armé d’un couteau dans une réelle sombre est extrêmement rare, c’est presque un mythe.

 

Lorsque l’on trouve une justification à ces bourreaux au prétexte qu’ils n’auraient pu résister à un pulsion soudaine et impérieuse, c’est faire montre d’une complicité insoutenable puisque les auteurs de ces crimes savent pertinemment ce qu’ils font. Ils ont une stratégie. Ils planifient. Ils ont un mode opératoire parfois presque parfait car la plupart de leurs victimes n’osent pas affronter un policier qui sera le plus souvent sceptique surtout en matière de viol conjugal.

 

La pulsion pourrait être remplacée par la prédation car c’est bien de cela dont il s’agit. Il faut admettre que se sont des chasseurs, ils attendent, ils choisissent, afin que la victime corresponde exactement à leur agenda, à leur mise en scène. La victime ne compte pas, elle n’existe pas à leurs yeux, elle n’est qu’un objet qu’ils dominent, soumettent et détruisent.

 

Les victimes préféreraient que ce grave abus ne leur soit pas arrivé. C’est scandaleux de les accuser d’inventer des histoires qu’elles sont les premières à souhaiter n’avoir jamais vécues. C’est le monde à l’envers.

 

Tout débute avec la police qui empêche les victimes d’obtenir justice. Les fausses allégations sont pourtant rares mais persistent encore pour les disqualifier. Raconter son histoire devant un inconnu dans un commissariat demande beaucoup d'énergie et de courage et il est important de combattre la culture du déni fortement ancrée dans notre société. La stratégie des agresseurs comporte toujours les mêmes rouages pervers, parmi lesquels ceux de l'inversion de la honte, de la culpabilité et du verrouillage du secret pour assurer leur impunité.

 

Que l’on arrête avec ce seul prétexte de pulsion incontrôlable parce que ces messieurs sont saturés de testostérone rendant leurs besoins sexuels insatiables et violents pour justifier que les femmes doivent se prêter de bonne guerre à ce désir impétueux par la soumission et la passivité inscrites dans des mentalités réactionnaires et misogynes.

 

Le viol est typiquement intentionnel. Il n’a rien a voir avec un désir sexuel. Le violeur veut soumettre, exercer son pouvoir en prenant possession du corps de l’autre pour en faire son objet, pour son plaisir de chasser, de faire mal, de détruire, de souiller et de déshumaniser.

 

A moins d’être déments ou ivres, les hommes ne violent pas les femmes lorsque les conditions extérieures ne sont pas propices et qu’ils ne sont pas certains de l’impunité ou croient l’être. lls ne violent pas en public. Le passage à l’acte d’un violeur survient suite à une évaluation réfléchie des risques et des chances de succès. Il faut qu’il y ait absence de témoins, faiblesse physique de la cible, qu’elle soit alcoolisée ou droguée, handicapée, etc. Si le risque est trop grand, le passage à l’acte sera suspendu.

 

Le viol est un comportement culturel de domination masculine pour abuser du corps des femmes, qu’elles soient enfants ou adultes, au mépris de leurs droits. Ce mythe d’une virilité bestiale légitime ces privilèges par leur nature intrinsèque de dominants et les rend ainsi inaccessibles à toute remise en question, en en faisant une fatalité avec laquelle les femmes sont obligées de composer. Ce sujet préoccupant reste encore tabou dans une société où elles sont néanmoins sensées être libres et surtout d'obtenir que la justice reconnaisse la gravité de ce qu'elles ont subi pour appliquer des sanctions sévères afin de mettre fin à cette impunité qu'on l'on ne saurait continuer de tolérer.

 

La sexualité masculine n’est pas par nature violente.

 

« Ceux qui utilisent la violence mettent en scène que les victimes sont des êtres inférieurs, sans valeur et de ce fait méprisables. Mais ce n’est qu’une construction mensongère leur permettant de justifier une véritable addiction à la haine. La violence est une drogue pour eux, très efficace pour se dissocier et donc s’anesthésier émotionnellement, et s’arroger une position de toute-puissance ». Muriel Salmona, 2013.

 

La pornographie libre d’accès est aussi l’une des pistes à analyser pour comprendre ces mises en scène où il s’agit de vaincre sous couvert d’une érotisation violente.

 

Sexualité et désir sont un ensemble de volontés réciproques. Ils n’ont rien d’instinctif, ce sont des constructions sociales. Aucune étude ne corrèle un lien entre les taux de testostérone et une agressivité sexuelle. Le manque ou la frustration sexuelle ne sont en aucun cas des arguments pour justifier un viol. Comme tous nos comportements, ils ne peuvent pas échapper aux lois qui régissent notre monde, ils sont soumis au respect des droits de chacun(e).

 

Les phases de libération sexuelle du 20 ème siècle ont permis de donner à chacun l’autonomie de son corps en ce qui concerne la sexualité mais elle a pu faire oublier qu’aucune liberté ne peut s’exercer aux dépens d’autrui, que le respect des droits à l’intégrité physique et psychique de son partenaire, le respect de sa dignité, sont des absolus qui ne souffrent d’aucune dérogation. Sans ces limites, la liberté devient la loi du plus fort et un outil de domination. Sous prétexte de liberté sexuelle, on pourra instrumentaliser le corps de l’autre et le soumettre à ses désirs, sans se soucier de son consentement et de son désir, consentement qui peut être d’autant plus contraint que les relations se font sur un terrain d’inégalité, de dépendance et de méconnaissance de ses droits.

 

Pour Philippe Brenot, il est « compliqué de conjuguer pour les hommes la pulsion permanente qui existe et le respect de la partenaire et de ses désirs ». Dans son enquête, les hommes qui se déclarent   « très satisfaits » de leur vie sexuelle représentent 33% du panel. « Seulement », commente l’auteur. La fréquence moyenne des rapports sexuels est de 8,4 par mois. Et 60% trouvent que ce n’est pas assez. La plupart des hommes parviennent à « s’autoréguler », précise le psychiatre, qui voit quand même pas mal d’hommes « qui ne savent pas que faire des pulsions sexuelles qui les démangent ».

 

La force de la pulsion sexuelle et sa place dans l’existence des hommes se révèle particulièrement importante. Et lorsque ce rapport à la sexualité devient névrotique, les conséquences peuvent devenir dramatiques et conduire au viol.

 

Il est urgent que des espaces de paroles et des aidants puissent se tourner vers ces hommes qui ne savent pas comment gérer leurs « besoins » mais surtout initier les garçons à la sexualité sans recourir à la pornographie, le machisme et la violence.

 

Si la pulsion sexuelle a effectivement tant d’empire sur les hommes, et que son déséquilibre a de si tragiques conséquences, alors oui, il s’agit d’un problème de santé et de sécurité publique, dont nous aurions tort de ne pas nous préoccuper.

 

Mais cette notion de pulsion incontrôlable sert surtout à déresponsabiliser les hommes : par cette affirmation d’incontrôlabilité, les hommes déclarent : quoi que nous fassions, aussi atroces que soient les crimes sexuels que nous commettons, nous ne saurions en être tenus pour responsables: « c’est pas nous, c’est nos pulsions ». 

 

Ceci impliquant que les femmes doivent se résigner à être violées à volonté par les hommes puisque que ces pulsions sont plus fortes que tout. Inutile de résister, soumettez-vous au droit d’accès sexuel masculin, c’est la nature qui veut ça, votre destin inévitable est d’être pénétrée contre votre volonté.

 

L'excuse de la libido irrépressible pour s'affranchir d'un viol est une imposture qui n'a aucune chance de passer, ni aucune autre excuse. Ce n'est pas le désir incontrôlable, c'est un désir incontrôlé odieux et indéfendable.

 

Quand les hommes ont ce type de besoin, forcer, n’est pas recevable. S’ils ont une envie pressante, ils ont leurs mains. Pas la peine de traumatiser une femme à vie parce qu’ils ont un problème avec eux-mêmes. Un homme ne doit pas violer. La solution c’est d’aller consulter un psy en urgence. Le viol est crime définit par l’article 222-23 du code pénal. 

 

Derrière l’argument de cette pulsion impérieuse, ce n’est pas la « nature » qui s'exprime mais ce stupide patriarcat phallocentrique replié sur lui-même et incapable de se remettre en question.

 

Des femmes continueront de se battre pour que Justice soit rendue. Elles sont là, elles parlent enfin et ne se taisent plus surtout et pour les plus courageuses, les plus téméraires, elles se battent mêmes si elles prennent des « coups » parce qu'elles refusent cette justice sclérosée.  

 

Courage à elles et bravo !                 

 

dses

 

En pardonnant trop à qui a failli, on fait injustice à qui n'a pas failli.

Baldassare Castiglione

 

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