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France, silence on viole ou qui ne dit mot consent…

25 Juillet 2018, 19:17pm

Publié par de soupirs en sourires

Les réactions sur le viol sont souvent minimisées et sont le révélateur d’une société qui ne veut pas admettre qu’elle va mal et qu’une impunité intolérable règne sans que personne n’y trouve à redire. D’aucun ne remettra en question que notre société est sexiste.

Mais que sont devenues les valeurs républicaines?

Comment un pays aussi puissant que la France ne prend pas en compte un phénomène qui s’exerce toutes les sept minutes sans qu’aucune action d’envergure ne soit réellement débattue et décidée par notre Parlement pour arrêter de protéger tous ces hommes violents?

On préfère jeter l’opprobre sur les victimes d’abus sexuels qui ne peuvent s’en prendre qu’à elles-mêmes car leur comportement est jugé, selon des critères totalement machistes, de leur pleine responsabilité?

Le voile sur le viol reste épais même si l’affaire Weinstein a libéré la parole et a permis de voir enfin apparaitre des haschtags comme #metoo ou #balancetonporc, la faiblesse des réactions et même leur absence restent curieusement étonnantes. Chaque jour les journaux nous livrent des faits sordides mais la discrétion reste de mise. Ou sont passées toutes ces victimes? Pourquoi ne s’expriment-elles pas? Ont-elles honte de n’être réduites qu’à ce statut de « viande avariée » selon Virginie Despentes?

Après la phase de choc, elles choisissent généralement de masquer avec force ce qu’il leur est arrivé et laissent croire que tout va bien parce que sinon, elles seront cataloguées et de fait, stigmatisées.

En se taisant, en laissant leurs agresseurs tranquilles sans les dénoncer, elles se mettent encore en danger et exposent d’autres victimes potentielles. En sont-elles conscientes? Le mouvement qui dénonce l’attitude illicites des agresseurs serait-il mort-né dans notre beau pays?

Les contingences autour de la dénonciation d’un homme sensé être respectable n’ont plus cours quand celui-ci se permet de prendre de force le corps d’un autre être humain et d’en faire un jouet sexuel. A quel prix est ce silence? Pour protéger l’éclatement de la cellule familiale? Par peur? Honte du scandale? Frayeur quant à une poursuite judiciaire?

Dans les foyers le mal continue inexorablement de briser des vies avec des rapports sexuels non consentis qui brouilleront le futur d’enfants, de femmes et d’hommes et on fera comme si ce problème n’avait pas eu lieu jusqu’au moment où la douleur psychique ne pourra plus être supportable et à ce moment-là, il sera peut-être trop tard.

La façon dont la société traite les victimes est elle aussi à réviser car celle-ci est encore trop souvent vue comme la fautive, même le bourreau dans un subtil inversement des rôles, endossera le rôle du persécuté, puisqu’elle a eu le tort d’avoir réveillé les pulsions d’un pauvre homme, prisonnier de ses déviances inavouables.

Lorsqu’elles oseront aller dénoncer ces actes, elles seront atomisées par des services de police baignés de culture du viol qui refuseront de voir la réalité de ce qu’elles ont enduré. Les paroles de certains tenants de l’ordre en plus d’être choquantes et inacceptables, renseignent finalement sur l’état d’esprit de beaucoup de français concernant le viol.

On comprend mieux que les victimes deviennent aphones et préfèrent choisir de se taire plutôt que de devoir recourir à des instances qui ne donneront pas de crédit à leurs paroles.

Elles vont tenter d’oublier jusqu’au prochain assaut qu’elles endureront de façon stoïque pour ne pas attirer l’attention sur elles. Elles prendront sur elles pour ne pas se retrouver à la rue où privées de leurs enfants.

Combien de temps cette vaste hypocrisie va-t-elle continuer? Combien de temps les agresseurs pourront continuer tranquillement de violer, harceler, violenter impunément des petites filles, des femmes, des soeurs, des cousines sans qu’aucune sanction ne soit prise au mépris de leur dignité?

C’est pourtant un scandale humain et social, à l’échelle d’un pays tout entier qui a aussi été rendu possible par la lente déshérence des services publics depuis le procès d’Aix. Les politiques d’austérité n’ont eu de cesse de diminuer les ressources de la justice.

On peut comprendre que le fiasco d’Outreau puisse jeter le doute sur les rares et courageuses déclarations des victimes mais ce n’est pas une raison pour les abandonner en arguant le plus souvent que 98% de ces victimes seraient quasiment toutes des mystificatrices. Il est plus aisé d’appliquer ce principe de « précaution » aux victimes potentielles mais pourquoi les auteurs eux, sont considérés comme sincères surtout lorsqu’ils correspondent aux critères « du bon père de famille ou du fils brillant au dessus de tout soupçon »?

La France va-t-elle encore continuer de balayer ces crimes sous le tapis, de continuer de s’engoncer dans des mentalités cloisonnées, de considérer le corps de l’autre comme une simple "marchandise" que l'on peut exploiter et utiliser, de continuer les violations des droits des femmes?

Une chose est sûre : la domination masculine se porte bien et les violences des hommes resteront impunies.

Pour changer cela il faut que la France comprenne que c’est plus de la moitié de sa population qui est en danger. La Suède vient d’adopter une loi suivie par l’Espagne où sans un consentement explicite c’est un viol. Leurs textes prévoient désormais qu'une personne est coupable de viol dès qu'elle a accompli un acte sexuel avec une autre qui n'y a pas participé "librement". 

L'objectif du législateur est de changer les comportements. Ces législations sont normatives mais surtout elles envoient un signal sur ce qu’est le consentement qui ne peut être présumé et dont il devient décidément urgent de débattre. C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire d'avoir "enfin une législation qui protège l'intégrité physique et sexuelle ».

L'article 222-23 du code pénal n'a plus lieu d'être car il ne prend en compte que la contrainte, la menace, la violence ou la surprise pour justifier une pénétration non consentie alors que l'on sait depuis longtemps que la sidération et la dissociation expliquent l'absence de réaction de nombreuses victimes de viol : un réflexe biologique de survie. 

Pendant un viol, un mécanisme s'enclenche pour éviter à la victime de faire un arrêt cardiaque. L'amygdale déclenche une série de réactions pour la survie peuvent entraîner une surchauffe. Pour éviter que le survoltage provoque un arrêt cardiaque, le cerveau déclenche une sorte de court-circuit avec de la morphine et de la kétamine. L’amygdale est isolée, la production d’hormones de stress est stoppée. Mais le corollaire de ce « court-circuit », salvateur sur le moment, est le fait que la victime de l’agression soit totalement coupée de ses émotions, comme spectatrice des événements : c’est l’état de dissociation. Elle ne bouge plus, ne se débat pas, ne crie pas. Suite à cette mise en quarantaine de l’amygdale, le souvenir n’est pas évacué vers l’hippocampe, censé être le siège de la mémoire. Il est piégé dans une région du cerveau qui n’y est pas dédiée et va donc se constituer en « mémoire traumatique ». La victime peut développer ce que l’on appelle un syndrome de stress post-traumatique.

De quoi expliquer que oui, une victime qui ne réagit pas reste une victime et n’est en rien responsable de son agression.

Mais tout le monde se tait. Par peur, par habitude, par complicité passive, par je-m’en-foutisme, par respect des traditions ou des conventions. Le harcèlement et les violences sexuelles sont de vieilles habitudes, tout comme l’indifférence ou la complaisance qui les accompagnent. Il faut beaucoup de courage, entend-on dire, pour parler. Mais on ne devrait pas trouver ça courageux. On devrait trouver ça normal.

En attendant en France, silence, on continue de violer en toute impunité !

dses

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